Pourquoi mourons-nous ?

Pourquoi la mort ?

La mort, un choix avantageux 

La mort est un des sujets qui intéresse - et surtout qui angoisse - les êtres humains depuis toujours. Habituellement, la mort est un thème étudié et analysé plus par les sciences métaphysiques ou la philosophie que par les sciences naturelles, pour lesquelles elle est un phénomène quasi banal. Pourtant, il me semble que ni les uns ni les autres n'ont encore donné de réponses claires et logiques en ce qui concerne certaines questions essentielles relatives à la mort. Après une prospection en profondeur et une analyse complète de la matière et du vivant, on comprend clairement ce qu'est la mort et quelles sont ses caractéristiques.

La mort et la Vie ont le même moteur : le mouvement. Le mouvement produit du changement ; et le changement est la modification d'une situation. Cela concerne absolument tout, que ce soit la matière ou les êtres vivants.

La Vie est une succession de transformations. Se transformer c'est être en vie, ou en mouvement. Mais le changement d'une situation induit aussi la mort de la situation précédente ; et, évidemment, la naissance d'une nouvelle situation sur les décombres de l'ancienne !

Puis, le mouvement n'est pas seulement là où on le voit clairement ! Il ne faut pas oublier que toute la matière est constituée d'un mouvement incessant de particules subatomiques ; donc rien n'est au repos. Même quand un animal est à l'arrêt, dans son organisme, tous ses organes et toutes ses cellules travaillent sans cesse ; et même si celui-ci est mort le mouvement à l'échelle moléculaire et atomique poursuit son évolution. Cependant, beaucoup de molécules peuvent former des structures solides qui possèdent une stabilité durable ; puis, certains matériaux sont périssables et d'autres - sous forme de gaz ou de liquide - n'ont pas une structure fixe. Ce sont ces différences qui induisent un raisonnement dual, où l'on spécule que certaines choses sont éternelles et que d'autres sont mortelles ! Si l'on analyse en profondeur le sujet de la Vie et la mort, on comprend qu'elles sont toutes deux engendrées par le mouvement-changement. Tout est en mouvement donc, tôt ou tard, tout change ! Et, comme tout dans l'Univers, l'être humain ne fait pas exception à ces lois universelles. L'enfant que vous étiez jadis n'existe plus ! Vous avez encore quelques souvenirs et vous êtes formé à partir de lui... mais vous avez tellement changé qu'on peut affirmer que maintenant vous êtes quelqu'un d'autre ! Cependant, quand les changements surviennent peu à peu on parle de transformation ou d'évolution et non pas de mort ; pourtant (de l'âge d'enfant à l'âge adulte) des milliards de cellules et de souvenirs ont définitivement trépassé. On meurt tous les jours un peu ! En même temps, on naît aussi... tous les jours un peu ! Puis, une personne âgée perd plus de cellules et de souvenirs qu'elle en récupère ; en conséquence, elle s'éteint peu à peu...

Si un être vivant meurt peu à peu - comme un feu qui s'éteint lentement... - nous considérons (à juste raison) qu'il se transforme ; et seulement quand ses fonctions vitales s'arrêtent (souvent brusquement) on considère qu'il meurt.

En conséquence, pour mieux traiter ce sujet, nous allons « séparer » en deux la mort qui touche les êtres vivants :

  • Première, celle qui est synonyme de Vie et on la considère comme un changement ou une transformation.
  • Deuxième, celle qui est synonyme de la fin d'une vie - elle représente l'arrêt des fonctions vitales - et on la considère comme la vraie mort.

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La plus commune et la plus grande question, concernant la mort en général, c'est : pourquoi les êtres vivants pluricellulaires sont-ils devenus quasiment tous des mortels ? En fait, c'était un choix - un choix très avantageux - qui a conduit à l'adoption de la mort par les êtres vivants les plus complexes. C'est la compétition qui a obligé les organismes vivants à être performants pour survivre. Ceux qui, après une bonne procréation, mouraient rapidement... laissaient plus de chances de survie à leurs progénitures qui, elles, comptaient dans leurs rangs des individus mieux adaptés aux conditions de leur environnement... De plus, les êtres vivants qui avaient choisi délibérément de mourir pouvaient consacrer plus d'énergie à la reproduction, car les réparations de leur corps n'étaient plus une priorité, étant donné que de toute façon, plus tard, il fallait mourir. Tandis que ceux qui avaient choisi la réparation parfaite de leur corps, « l'immortalité », tôt ou tard étaient détruits par les autres ou par la nature ; leur conservatisme les rendait plus rigides et ils avaient moins de capacités d'adaptation. De plus, ils occupaient aussi les places qui auraient été les plus propices pour leurs éventuelles progénitures. Puis, la régénération parfaite est possible mais sûrement très coûteuse et très contraignante : cela nécessiterait beaucoup trop d'énergie pour alimenter tous les mécanismes et beaucoup trop de dispositions pour réparer parfaitement et en permanence l'organisme - et l'être en cause serait, entre autres, moins puissant « qu'une simple brute » qui ne cherche qu'à se nourrir et à se reproduire, ensuite la mort peut venir ! Les « brutes simples, agressives et compétitives » ont dévoré tous « les êtres délicats, complexes et peu compétitifs » qui auraient choisi de posséder des dispositifs très chers pour profiter d'une régénération parfaite...

En résumé, la raison principale pour laquelle les êtres vivants ont dû choisir une existence soumise à la mort c'est la compétition. Sans celle-ci, auraient pu survivre des êtres vivants plus complexes, qui posséderaient des mécanismes de régénération parfaits ! Mais la compétition est omniprésente et la mort s'est imposée dès le départ comme une option avantageuse pour être plus compétitif. En conséquence, ceux qui ont choisi de se reproduire abondamment et de mourir rapidement ont fait le choix le plus performant en matière d'adaptation... et l'évolution par sélection naturelle les a favorisés.

La capacité de se procurer aisément de la nourriture et celle d'une reproduction efficace sont primordiales pour le succès d'une espèce ; surtout dans un monde en compétition ! Mourir, après avoir rempli le rôle de géniteur c'est aussi offrir sa place pour les générations suivantes. La mort des individus âgés, malformés ou malades offre plus de chances de survie à l'espèce. Nous avons dans la nature des exemples concrets pour comprendre que la reproduction est le but ultime d'un être vivant et que la mort de procréateurs est un avantage décisif pour l'espèce : une fois adultes, les saumons quittent les océans et font un dernier voyage pour se reproduire dans les eaux des rivières où ils sont nés, puis ils meurent et leurs corps servent d'engrais et de nutriments dans les eaux où leurs progénitures prendront naissance ; la femelle pieuvre géante du Pacifique se reproduit une seule fois et avant l'éclosion de ses descendants, elle meurt ; après l'accouplement l'araignée mâle est mangée par sa femelle - dite veuve noire - et sert ainsi à la survie de la prochaine génération ; pour un autre arachnide, la femelle araignée se sacrifie... et porte en elle les petits qui la dévorent vivante...

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Finalement, sur Terre, les espèces qui ont adopté la mort ont eu un avantage tellement important que quasiment tous les organismes pluricellulaires sont devenus des mortels. Les êtres vivants n'ont pas eu besoin de trop chercher de méthodes pour se « suicider ». Il a suffi tout simplement de se laisser mourir. Il est évident que si, à partir d'un moment donné, vous abandonnez un édifice, celui-ci tombera en ruines et si vous délaissez un jardin les mauvaises herbes l'envahiront... Pour le corps humain, c'est pareil. Les lointains ancêtres d'organismes pluricellulaires ont opté pour une régénération limitée de leur corps. Ainsi, la dégradation de télomères, l'oxydation de cellules et l'accumulation de blessures, de toxines, de défauts... font parfaitement l'affaire pour tuer un être vieillissant qui, de plus, se protège et se régénère de moins en moins. Par exemple : seules les cellules jeunes, les cellules germinales (ovocytes et spermatozoïdes) et les cellules cancérigènes produisent de la télomérase - sans elle, les télomères (terminaisons du matériel génétique) ne peuvent plus se régénérer et après un cycle de cinquante duplications (chez l'être humain) les cellules meurent sans laisser de descendants. À cela se rajoutent d'autres problèmes... et la mort par dégradation et renoncement de la régénération est assurée.

Dans ce monde en compétition, où la sélection naturelle opère en permanence, la mort a été un choix très avantageux. En conséquence, elle a été rapidement et irrévocablement adoptée par tous les êtres vivants complexes.

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Extrait de l'ouvrage L'évolution de la vie sur terre